Études de cas

L’acceptation tacite d’une assurance vie doit résulter d’actes non équivoques

Mise en ligne février 2022 - Mise à jour décembre 2022

Assurance vie

L’acceptation du bénéfice d’un contrat d’assurance vie peut être expresse ou tacite. Dans ce dernier cas, elle doit, pour être opposable aux tiers, relever d’actes positifs exprimant l’intention dépourvue d’ambiguïté du bénéficiaire acceptant.

Étude de cas

Une assurée a souscrit un contrat d’assurance vie et a désigné comme bénéficiaire son fils unique, selon la clause suivante « Monsieur X, à défaut mes héritiers ». En 2013, au décès de l’assurée, son fils sollicite auprès de l’administration fiscale un certificat de non-exigibilité ou d’acquittement de l’impôt, document nécessaire au versement des sommes dues.

À réception du document, le bénéficiaire n’effectue aucune démarche auprès de l’assureur, qui n’a d’ailleurs pas connaissance du décès de l’assurée. Cette information ne lui est communiquée que quatre années plus tard après consultation du RNIPP, dans le cadre de ses obligations imposées par la loi Eckert.

L’assureur procède alors aux démarches nécessaires en vue du règlement des capitaux décès et adresse, pour ce faire, plusieurs courriers au bénéficiaire. Ce dernier n’y donne pas suite, jusqu’à son décès en 2019.

À cette date, les héritiers du bénéficiaire prennent contact avec l’assureur afin de percevoir, en cette qualité, les capitaux décès non versés. Ils communiquent à cette occasion le certificat de non-exigibilité de 2013.

L’assureur estime que les démarches entreprises par le bénéficiaire ne démontrent pas son acceptation du contrat. Il refuse donc de verser les capitaux décès dans le cadre de l’assurance vie et précise qu’elles doivent intégrer l’actif successoral.

L’article L.132-9 du Code des assurances dispose qu’après le décès du stipulant, l’acceptation du bénéfice du contrat d’assurance sur la vie est libre. Le bénéficiaire a ainsi la possibilité d’accepter ou de renoncer à son droit de créance. L’acceptation rend alors ce droit définitif et irrévocable.

La Cour de cassation admet que l’acceptation puisse être tacite. Dans ce cas, elle doit « relever (…) d’actes positifs exprimant une intention dépourvue d’ambiguïté ». L’appréciation des éléments de preuve appartient alors au pouvoir souverain des juges du fond[1].

Les démarches du bénéficiaire doivent donc permettre d’établir le caractère non équivoque et sans ambiguïté de la volonté du bénéficiaire d’accepter le bénéfice de la stipulation effectuée à son profit. Cette exigence n’est pas remplie lorsque le bénéficiaire désigné a, pour seule démarche, sollicité auprès de l’administration fiscale l’un des documents nécessaires au versement des capitaux décès, puis n’a effectué aucune autre action durant les cinq années suivantes et a gardé le silence à réception des courriers de l’assureur l’informant de l’existence de ce contrat.

Solution

Ainsi, le bénéficiaire n’a pas accepté, même tacitement, le bénéfice de ce contrat souscrit par sa mère. En l’absence d’acceptation, expresse ou tacite, du contrat par le bénéficiaire, l’intégralité des capitaux doit être versée aux héritiers du bénéficiaire de premier rang décédé, sauf en présence de bénéficiaires de second rang auxquels le capital décès devra être versé en priorité[2].

En l’espèce, le bénéficiaire de second rang étant également Monsieur X en tant qu’héritier de l’assurée, le capital décès devait donc être versé par l’assureur aux héritiers du bénéficiaire de premier rang et ne devait donc pas intégrer son actif successoral.

Recommandations du Médiateur

La seule demande formulée par un bénéficiaire auprès de l’administration fiscale d’un certificat de non-exigibilité ou d’acquittement de l’impôt ne saurait être considérée, à elle seule, comme la preuve de son acceptation tacite du contrat d’assurance vie.


[1] Cass. civ. 1ère, 15 décembre 1998, n° 96-20.246.

[2] Cass. civ. 2ème, 17 septembre 2009, n° 08-17.040.

Voir aussi